Les populations souffrent le martyr dans les régions du Septentrion du Cameroun, où les températures atteignent les 45° C à l’ombre depuis trois mois.

Les habitants ont la voix grave lorsqu’il faut évoquer les conséquences des vagues de chaleur qui sévissent dans les régions de l’Extrême-Nord et du Nord du Cameroun. Là-bas, il est devenu presqu’impossible de mener à bien ses activités en journée. Si ces régions sont connues pour des températures élevées, un peu au-dessus de la moyenne nationale, les populations font cependant savoir que le mercure n’avait pas autant grimpé depuis 1995. Depuis bientôt trois mois pourtant, le thermomètre affiche les 45°C à l’ombre. Le soleil pointe son nez très tôt le matin et la chaleur sévit jusque tard vers 19 h, apprend-on.

« Ce n’est pas du tout facile de vivre à l’Extrême-Nord depuis le mois de mars. Le soleil brûle sur la peau. On ne peut pas exercer ses activités normalement. On n’a pas envie de durer dehors. Les gens se hâtent de vite faire et rentrer à la maison. On a soif de temps en temps », déplore Rebecca Sintebe. La jeune dame qui réside au quartier Domayo, dans l’arrondissement de Maroua 1er, a trouvé comme astuce de toujours emporter une bouteille d’eau dans son sac lorsqu’elle est appelée à sortir de la maison. Dans les décomptes, elle fait savoir qu’elle consomme en moyenne 4,5 litres d’eau chaque jour.  

Sept douches par jour

Les vagues de chaleur à l’Extrême Nord du Cameroun perturbent les activités. Photo

A Meskine, un autre quartier de Maroua, Béatrice M. se plaint de l’apparition de petits boutons sur le corps. Elle s’interdit souvent les sorties entre 12h et 14h, lorsque le soleil est au zénith. « A ces heures-là, il est même souvent difficile de trouver une moto, principal moyen de transport dans la ville. On peut patienter près de 30 minutes sur place. Ces mototaximen choisissent ces horaires-là pour aller aussi s’abriter du soleil», explique la riveraine. Elle fait savoir que face à ce soleil ardent qui fait beaucoup suer, ses frères et sœurs prennent en moyenne sept douches par jour, pour garder une certaine sensation de fraicheur et se réhydrater la peau.

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L’équation semble plus difficile chez les enfants scolarisés. Ces derniers qui passent une bonne partie de la journée dans les salles de classe n’ont pas la possibilité d’y prendre des douches. « Quand ils reviennent de l’école, ils sont fatigués. Ils ont l’ai abattu. Souvent ils n’ont plus d’appétit. Ils souffrent un peu plus que nous les adultes», déplore Béatrice. Les enseignants ne sont pas épargnés. Pénible de dispenser des cours dans cette fournaise. Conséquences, certains manquent à l’appel pendant plusieurs jours dans la semaine.

Ces trois dernières semaines, je ne suis allé enseigner que deux fois. Il fait tellement chaud qu’à 8h tu as déjà finis 3 litres d’eau. À 10h, tu as des vertiges. Maintenant, prends donc la moto pour rouler sur 30 km sous la chaleur… C’est trop grave“,

confie un enseignant du lycée de Doulek, dans l’arrondissement de Meri. “Je suis sorti ce matin à 8h pour aller chercher du pain à la boutique. J’ai marché sur 10 mètres et j’ai fais demi tour. Je n’ai pas remis mon nez dehors“, fulmine le pédagogue. Qui, comme de nombreux autres collègues, peine à s’adapter au nouveau climat. Le bétail aussi subit les affres de ces vagues de chaleur dans l’Extrême Nord du Cameroun. Les bêtes courent chercher abri lorsque les conditions atmosphériques deviennent extrêmes.

« On discute l’ombre avec les animaux »

« Il fait tellement chaud que les hommes discutent l’ombre avec les animaux. Il n’y a pas assez d’arbres, parce que les gens les coupent pour faire la cuisson. Les quelques arbres visibles qui produisent de l’ombrage sont pris d’assaut »,

affirme un paysan, qui relève que la dernière fois que la ville de Maroua a été arrosée par une grande averse remonte au mois de septembre 2023, il y a huit mois.    

A Garoua, chef-lieu de la région du Nord, les effets de ces vagues de chaleur sur les populations sont les mêmes. Lamissia A., un habitant du quartier Djamboutou, dit ressentir des démangeaisons sur le corps et le visage à cause de cette canicule. Il a opté pour une réduction de ses déplacements. « C’est vraiment difficile. La température varie entre 39 et 45° C. Je bois beaucoup d’eau et évite de sortir en journée, même en véhicule. La climatisation de la voiture ne tient pas avec cette extrême chaleur », affirme-t-il.

Dans les localités de l’Extrême-Nord comme dans celles du Nord Cameroun, les populations évoquent plusieurs décès liés à la canicule. Même si aucune déclaration officielle ne confirme cet état des lieux, plusieurs habitants soutiennent que des personnes âgées et en particulier celles atteintes de diabète et de maladies respiratoires sont les plus grandes victimes de ce changement climatique.

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Eviter de consommer d’alcool

Il existe cependant quelques gestes de prévention afin d’éviter des répercutions de ces vagues de chaleur sur la santé humaine. Dans un communiqué de presse publié le 10 mai 2024 y relatif, le ministre de la Santé publique du Cameroun, Manaouda Malachie, recommande d’entrée de jeu de boire suffisamment d’eau tout au long de la journée. Il est demandé d’éviter les activités physiques intenses pendant les heures les plus chaudes. Le ministre de la Santé recommande de rester à l’ombre et de porter des vêtements légers et amples.

Les points 5 à 7 dudit communiqué préconisent de « surveiller les personnes vulnérables comme les personnes âgées, les malades chroniques et les enfants ; Se mouiller le corps régulièrement ; Aérer les logements tôt le matin et pendant la nuit ». Le 8ème et dernier geste de prévention à adopter recommande d’éviter de consommer de l’alcool, « car cela peut augmenter la déshydratation », lit-on. Le communiqué du ministre de la Santé énumère également quelques signes d’alerte généraux comme les crampes, les maux de tête, les nausées ou des fatigues inhabituelles. Les signes de déshydratation sont aussi communiqués au public via ce document officiel.

Mathias Mouendé Ngamo

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